La série
communément appelée « Chiffres sur lion » ne connaît toujours
pas la grande vogue chez les philatélistes belges, et il est fort rare
de voir dans les cadres d’une exposition une collection spécialisée en
ce domaine… Pourtant, cette série ne manque ni d’intérêt ni de
variété !
Elle en effet
connu deux types d’impression : la taille-douce (n° COB 841) et la
typographie (toutes les autres valeurs), deux formats différents, trois
sortes de papier, diverses dentelures, et elle offre même aux
collectionneurs de haut niveau une rareté (n° COB 1370PB). Ajoutons à
cela quelques surcharges, des timbres partiellement non dentelés
(extraits de carnets), des préoblitérations, des
surcharges-préoblitérations, des timbres en rouleaux, quelques timbres
de service, de nombreux entiers postaux : voilà certes de quoi
réaliser une étude des plus fouillées ! De plus, à part quelques
cas, tous ces timbres sont d’un prix très abordable, tant en neufs
qu’en oblitérés ou même sur plis… Par ailleurs, elle a survécu à de
nombreux changements de tarifs, ce qui permet de passionnantes
recherches en timbres sur lettres !
Le dessin de
cette série, simple et attrayant, est dû à William Goffin, un artiste
belge fort apprécié de la Poste à cette époque, puisqu’on lui doit
aussi, entre autres, le dessin des séries « Breendonk » (n°
COB 860/862), « Châteaux » (n° COB 868/75) et même
« UPU » (n° COB 880/91). La gravure du 20c en taille-douce
est l’œuvre de Léon Janssens, un des excellents graveurs de l’époque.
(Notons en passant que notre COB lui attribue également la gravure des
timbres imprimés en typographie… La chose nous étonnerait très fort,
car Janssens était un spécialiste de la taille-douce !)
Peu de
philatélistes savent que les feuilles de cette série ont connu pas
moins de quatre présentations différentes. Le 20c gravé a été imprimé
en feuilles de 50, comportant un numéro de planche (de 1 à 4) et un
coin daté. Les valeurs en typographie ont d’abord été imprimées en
d’immenses feuilles de 400 exemplaires, répartis en quatre panneaux de
100 timbres. Enfin, on est revenu à des dimensions plus modestes :
des feuilles de 100 en dix rangées de 10 exemplaires. Le 1F grand
format rose a été imprimé en feuilles de 50, tandis que les timbres
grand format destinés à la confection de rouleaux le furent en bandes
continues d’une largeur de 10 timbres. Ces bandes continues furent
d’ailleurs ensuite débitées en « feuilles » de 60 ou 120
exemplaires.
Nous
voudrions aujourd’hui nous pencher sur le cas des feuilles de 4
panneaux de 100 timbres. Ces feuilles comportaient bien entendu des
interpanneaux tant horizontaux que verticaux. Diverses inscriptions se
retrouvent tant dans les marges que sur les interpanneaux, et c’est
celles-ci que nous voulons évoquer ici…
interpanneau horizontal du
n° COB 1173
interpanneau
vertical du n° COB 1173
Ainsi qu’on
le voit, chaque panneau de 100 timbres est entouré d’un filet
d’encadrement, dont le rôle principal était de protéger les arêtes des
clichés extérieures, arêtes qui souffrent assez atrocement lors d’une
impression en typographie sur rotative. Tous ces timbres étant
monochromes, les filets d’encadrement sont bien entendu de la même
couleur que les timbres…
Les panneaux étaient disposés en deux
rangées de deux panneaux. La dentelure était continue entre panneaux
dans le sens vertical, mais s’interrompait lors de l’interpanneau
horizontal. Cette disposition en deux rangées créait, au centre de la
feuille, quatre timbres séparés par des interpanneaux horizontaux et
verticaux : on obtenait ainsi ce que les (rares) spécialistes de
l’époque appelaient des « croix centrales ».
Très peu de
ces « croix centrales » ont été conservées : la grande
taille des feuilles amenait les guichetiers à les plier en quatre pour
pouvoir les héberger dans leurs classeurs à timbres. La plupart des
interpanneaux et des croix présentent donc des plis… Souvent même, les
guichetiers débitaient les feuilles en panneaux séparés avant que de
les ranger dans le classeur ad hoc. Nous connaissons une spécialiste de
l’émission qui recherche depuis des dizaines d’années une « croix
centrale » du n° COB 1173A, sans le moindre succès !
(Signalons cependant que les bureaux temporaires et/ou de prévente
disposaient généralement de feuilles complètes qu’ils pouvaient vendre
en l’état… D’où un petit jeu folklorique qui eut son heure de
gloire : on achetait une feuille de 400 timbres de 2c ou 3c, pour
la modeste somme de 8 ou 12 francs, et on demandait au préposé du
bureau d’en oblitérer proprement tous les timbres !)
Venons-en
maintenant aux inscriptions marginales que l’on pouvait trouver sur ces
fameuses feuilles :
Les numéros de ligne :
les lignes de chaque panneau étaient numérotées à gauche de 1 à 10, par
d’assez grands chiffres bien sûr imprimés dans la couleur du timbre
lui-même. Ces numéros se trouvaient donc dans la marge gauche et dans
les interpanneaux horizontaux. Il arrivait cependant que certaines
feuilles fussent dépourvues de ces numéros, ainsi que le montre
l’exemple du 3c.
les
croix de repère : ces petites croix (ou fragments de croix)
servaient essentiellement au réglage des herses effectuant la
dentelure. On les trouve près des coins des panneaux. On peut même
trouver deux croix face à face sur un même interpanneau
horizontal !
Les marques de
contrôleur : ces marques sont composées d’un nombre inscrit
dans un cercle. Ils sont apposés à l’encre noire après l’impression des
feuilles.
Les millésimes et numéros de feuille :
Ils sont aussi appliqués à l’encre noire après l’impression des
feuilles : ces empreintes comportent en général les lettres
« TB » accompagnées du millésime et du numéro de la feuille.
Enfin, on trouve sur la plupart des feuilles
un trou circulaire réalisé à l’emporte-pièce. On suppose qu’il
s’agit là d’une marque de contrôle…
Signalons que les timbres préoblitérés
portaient dans la marge des indications sur les modalités de leur
emploi. Ces indications étaient imprimées en noir en même temps que la
préoblitération. Il arrive qu’un décalage lors de l’impression fasse
porter une partie de ces textes sur les timbres eux-mêmes. De tels cas
sont cependant très rares !
Voilà de quoi
faire passer à tout philatéliste dévoué à sa passion de nombreuses
soirées de recherche et de classement. Il ne faudrait pas non plus
négliger les variétés que l’on peut trouver sur certaines
valeurs : le COB en donne les principales, mais on peut en trouver
d’autres !
Les timbres
sur pli (au tarif exact, bien entendu) ne posent en général pas trop de
problèmes, surtout pour les valeurs ayant correspondu au tarif des
imprimés. Deux exceptions notables : les timbres à 2c et 3c !
Ces timbre correspondaient pourtant à un tarif bien précis : celui
des journaux expédiés sous bande adressée par l’éditeur mais livrés en
même temps que les exemplaires destinés aux abonnés. Autant dire qu’il
s’agissait d’un cas rarissime…